De San Ignacio, nous avons pris le bus pour Buenos Aires de nuit. Mais avant cela, nous l’avons surtout attendu.
2 à 3 heures de retard, après un certain temps, on ne compte plus. Quand on leur demande à la gare routière ce qu’il se passe, la réponse est on ne peut plus clair et on ne peut plus flou : aujourd’hui, ils sont tous en retard.
Cela représente très bien l’Amérique du Sud.
Pas le fait que le bus soit en retard, plutôt le fait qu’il n’y a pas vraiment de règle.
On pourrait croire que chaque pays à sa règle, eh bien non, chaque région peut être, beh non plus, chaque compagnie de bus, encore moins, juste chaque bus a son fonctionnement. La plupart du temps nous avons demandé au gens le fonctionnement du bus, pas par peur de le louper, mais surtout par peur de ne pas comprendre ces fonctionnements tant hétérogènes entre chaque bus. Où vont les bagages cette fois, avec nous dans le bus, en soute, au-dessus, le bus s’arrête dans toutes les villes, dans aucune où n’importe où, un repas est servi, parfois rien, parfois il faut aller se servir dans le frigo, pause pipi, pas de pause pipi… Bref, parfois on a l’impression que même chauffeur ne savait pas trop ce qui allait se passer dans les prochaines heures.
Ce n’est pas grave, et ça n’a pas beaucoup d’importance sur le trajet en soi, mais cela apporte un peu plus de quiétude de savoir où l’on met les pieds de temps en temps.
En tout cas on monte dans le bus, et là surprise, siège couchette, grosses couverture, oreiller, repas avec deux entrées, deux plats, deux desserts, une boisson, une café, une douceur. Donc voilà une très bonne nuit dans le bus, et arrivé au petit matin à Buenos Aires, après un petit déjeuner servi dans le bus, sous 35 degré à l’ombre.

On est le 5 janvier à Buenos Aires, début de l’été, il fait bien chaud quand même.
Et pour eux cela est plus une température habituelle ce que pour nous serait une chaleur caniculaire. Ils ont l’air habitués. On ne peut pas trop développer Buenos Aires, beaucoup nous ont dit avant d’y passer, Buenos Aires on adore ou on déteste, beh nous ça nous a juste rien fait de spécial.
Une grande capitale bien étalé, le long d’un fleuve très pollué (ils le disent tous ici, comme quoi ils n’ont pas la mer mais la rivière, et à y regarder de plus près, en effet, ils sont situés dans l’estuaire). Des grands buildings, des costards cravates, des quartiers riches, des quartiers pauvres, des quartiers touristiques, enfin surtout un, la Boca, et pas grand-chose qui nous a fait faire wouah !
Le premier jour nous nous sommes baladés avec Marie rapidement, et c’est tout.
Le second jour nos amis de Paris, Alban et Carlos sont arrivés et nous les avons fêtés.
Le troisième jour, je suis passé voir une amie de Buenos Aires que j’avais vu pour la dernière fois il y a 15 ans pendant un voyage au Pérou. Et après un moment d’adaptation on se dit qu’on a rien perdu. Les gens changent, nous aussi, mais la relation que l’on a avec eu, elle reste la même. Vraiment un bon moment.
Le quatrième jour, avant de reprendre l’avion pour le Nord de la Patagonie, à San Carlos de Bariloche, nous nous sommes rendus à la Boca. Un des quartiers historiques de Buenos Aires. Alors port d’entrée de tous les immigrants venus travailler lorsque l’Argentine a ouvert ses frontières.
D’ailleurs le gouvernement d’alors souhaitait attirer les ingénieurs et scientifiques allemands, les personnalité politiques, les écrivains d’Europe, en tout cas ce qui faisaient la pluie et le beau temps sur le vieux continent.
Ils ont vu arriver en fait par milliers des ouvriers italiens, des bergers irlandais, de la main d’œuvre des pays de l’est et du moyen orient, mais aussi, un peu plus tard dans l’histoire, les dirigeants nazis qui fuyaient la guerre et avaient trouvés refuge en Amérique du Sud, plus précisément en Argentine.
Cette partie de l’histoire est depuis quelques années, voir un peu plus, très difficile d’accès, du a l’omerta. La recherche des fuyards nazis a fait beaucoup de dommage collatéraux ici, que ce soit dans les régions, les communes, les villages, les commerces, les familles. Donc plus personne n’en parle. En fin de séjour en Argentine, on a séjourné avec Marie dans une colonie suisse, suisse Allemagne Autriche, même combat, en tout cas nous ne nous sommes pas permis d’aborder le sujet.
Bref pour revenir à la Boca, cet ancien port, car depuis déplacé, est devenu un lieu très touristique. Mais seulement la journée et que dans une toute petite partie du quartier, entre 4 rues et c’est tout. Le reste du temps, et de l’espace, ce quartier, même si il est grand, est comme un petit village, très pauvre, où tout le monde se connait, et où l’inconnu n’est pas le bienvenu. Le touriste est synonyme d’argent, l’argent d’envie, et l’envie de…. J’ai plus d’idée, mais vous voyez ce que je veux dire, ça craint.
Pour la partie « visitable » elle a été rendu célèbre par un gamin des rues, qui… je m’arrête là juste pour vous dire que je n’ai plus son nom en tête, ça fait bientôt deux mois que nous avons fait un petit tour dans ce quartier… donc ce gamin a commencé à peindre des portraits et des moments de la vie des gens du port, qui vivaient sur les docks, ils dessinaient tellement bien qu’il a été connu et reconnu et a ainsi pu s’exporter à l’étranger et faire de nombreuses galeries un peu partout notamment en Europe.
Il est revenu au pays et avec l’argent qu’il avait amassé il a peint quelques bâtiments du port, puis quelques maisons et tout cela s’est transmis à d’autres personnes, d’autres artistes (qui ont créés une sorte de résidence pour qui souhaitaient y participer). Ainsi le quartier et ses maisons, faites pour la plupart avec des éléments que l’on peut trouver dans un port (bout de bateau, tôles ondulés, charpentes inventés avec les matériaux trouvés çà et là) sont toutes peintes de manières très vives.
De nombreuses fresques recouvrent également les murs pour parler de la situation politique (souvent la corruption et les morts disparus, inexpliqués) pour rendre hommage à ses artistes, mais aussi au personnalité qui ont fait ce quartier, des footballeurs aux pompiers entre autre.

En effet, une autre particularité de la Boca est son club de foot, aux couleurs bleu et jaune, où a évolué Maradona : Boca Juniors. Bref, on vous explique pas le nombre de tatouage à l’effigie du club ou de Diego, il y en a trop (et comme d’habitude, ils ne sont pas tous réussis). Beaucoup, énormément, trop de ferveur peut être pour ce club, et dans ce stade (qualifié de plus impressionnant au monde lorsqu’il gronde) mais cela fait partie de la culture profonde du quartier.
D’ailleurs le guide qui nous a fait faire le tour du propriétaire, enfin du quartier, a passé bien trois quart d’heure à nous parler de foot. Marie, Alban et Carlos étaient vraiment enthousiastes.
Ces couleurs, bleu et jaune, ne sont pas seulement celles du club de foot, ce sont aussi devenus celles des pompiers du quartier. Le quartier étant devenu si pauvre et si mal famé, les pompiers n’y mettaient pas non plus les pieds. Lorsqu’un grand incendie a eu lieu, la mobilisation des habitants et surtout de certains d’entre eux, a permis d’éteindre le feu gigantesque qui ravageait le quartier (qui est justement fait de bric et de broc particulièrement inflammable). Ainsi sont nés les pompiers volontaires de la Boca.
D’ailleurs lorsque l’équipe de foot gagne une compétition ce sont eux qui passent dans les rues de la Boca avec leurs camions pour emmener les supporters (fanatiques!) fêter la victoire sur la grande place de la capitale à Buenos Aires. En fin de compte, la Boca est une vraie ville dans la capitale avec ses propres codes et ses propres couleurs. Même si la Boca n’a pas une aussi grande place qu’avant pour Buenos Aires, elle reste très importante.

Notre guide justement nous a dit que ce quartier s’appelle ainsi parce que l’étendue d’eau qui forme le quartier et le longe à une forme de bouche.

Au nombre de guide que nous avons vu depuis plusieurs mois et qui changent le cours de l’histoire au gré de leur humeur ou de la bonne idée qui leur est tombé dessus pendant la nuit, une autre explication aurait eu plus de charme. En Argentine, on trouve de tout que ce soit en termes culturelles, culinaires, artistiques, architecturales, enfin presque tout. En termes de personnes, les personnes ont pour beaucoup de noms italiens, polonais, ils sont roux, blonds, bruns, bronzés, pâles. Bref il y a de tout.

Dans tous les cas, le melting pot culturel rencontré du Nord au Sud de l’immense argentine, les différences complémentaires qui forment ce pays sont pour la grande majorité, arrivé par ce port.

La boca, signifie la bouche, et l’on peut, sans trop se tromper, se dire que ce quartier, ce port, à réellement alimenter l’Argentine pour en faire ce qu’elle est maintenant.

Ca y’est je sais inventer des histoires tordues...plus tard je serai guide.