Nous voici donc au terme d’un périple (le mot est pesé) de deux mois en Mongolie.


Encore quelques jours, dont deux à Pékin s’ils ne nous refusent pas le visa de transit, et nous serons de retour. Mais l’heure n’est pas encore aux bilans. Il est temps pour nous de retracer nos dernières semaines passées dans les steppes mongoles. Le but étant pour nous de ne pas perdre tous les souvenirs emmagasiner pendant ces deux mois, et ils sont nombreux et parfois intenses.


Nous avions trouvé sur un site web le moyen de louer une moto sur Ulaan Bator (UB) pour seulement 13€/jour, nous souhaitions donc voyager dans ce pays de cette manière, fort de nos deux derniers mois passés sur une petite moto au Laos et au Vietnam. Après avoir prolongé nos visas afin de pouvoir rester ici 60 jours, nous sommes partis jeter un œil sur la moto et le loueur en question. Tout cela à l’air sérieux et les motos sont en bon état. Elle est plus grosse, la dernière était d’un petit cylindre, 107cc, celle-ci est de 150cc, et son poids et sa taille sont plus imposantsµ. Je suis mi-rassuré quant à ma capacité à conduire cet engin, mais banco, de toute façon on est partis pour. Nous retournons sur UB, il nous faut deux petits sacs pour pouvoir chargé la moto de façon adéquate. Une tente est également nécessaire, peu importe sa qualité, il faut qu’elle tienne deux mois c’est tout ce qu’on lui demande.( et c’est le temps qu’elle tiendra)


Après une semaine à UB, nous prenons donc la route, la loueuse nous explique « continuez la route tout droit vers le Sud Ouest, et à la prochaine station essence, prenez à droite sur la piste et c’est parti pour l’aventure » . En effet ce sera une aventure.

Un récit chronologique de toutes les étapes est inutile, mais entre les paysages, les hommes, les routes et les anecdotes il y a beaucoup à raconter. Commençons par les routes.


On pensait avoir tout vu au Vietnam et au Laos mais on s’était lourdement trompé. La première piste était correcte, faite de gros cailloux, il fallait appréhender la moto et cela s’est fait sans mal. La seconde, de treize kilomètres seulement afin d’atteindre un parc national ou des chevaux sauvages en voie de disparition ont été réintroduit était d’un tout autre calibre. De la terre, alternant avec de la poussière et des herbes, et parfois du sable… beaucoup de sable. Autant dire que la concentration était maximale, la sueur présente et les quelques montées d’adrénaline lorsque nous sommes à deux doigts de chuter très intenses. Nous sommes le premier jour et l’on se demande si cela va être la tendance pour toute la Mongolie, ou si cela n’est qu’une mauvaise piste à parcourir. En fait ce sera bien pire à certains moments.


Le lendemain nous refaisons ces 13 kilomètres non sans appréhension pour reprendre la route asphaltée. En Mongolie, il y en a très peu, seul les grands axes sont de bonnes factures, le reste n’est que pistes. Disons 2/3% des routes permettent de circuler rapidement. Nous sommes à peine à 100km d’UB et déjà les steppes déroulent autour de nous sans discontinuer. Nous levons aussi souvent les yeux au ciel où de nombreux aigles nous survolent, ils sont parfois postés sur les côtés de la route nous regardant passé comme les vaches le font avec les trains. Il nous est aussi arrivé à plusieurs reprises que l’un d’entre eux nous accompagnent sur plusieurs centaines de mètres. Nous sommes juste fascinés. Mais les routes, même asphaltées, ne nous laissent pas beaucoup de temps à la contemplation, enfin surtout pour le conducteur. Ici lorsqu’il y a un nid de poule, avant de le reboucher, ils le recreusent plus large, en carré ou rectangle, et plus profond afin de faire cela proprement. Mais entre le moment où ils creusent et le moment ils le rebouchent le laps de temps est variable et parfois long. Ainsi il est commun d’avoir des trous d’un mètre sur un , voire parfois qui prennent toute la largeur de la route sortie de nulle part. Le danger est bien présent.


Entre chaque village il y a souvent plusieurs dizaines de kilomètres et entre chaque station essence souvent plus d’une centaine. Nous nous calons sur les villes pour effectuer les premières étapes et ne manquer de rien. Histoire de prendre nos marques la première semaine nous campons également à proximité des villes. Après une première semaine de conduite plus ou moins sereine, nous devons sortir des routes pour entamer les pistes et s’engager vers le Nord.


2 kilomètres après la ville où nous étions installés la route se sépare en 3/4 pistes , une à gauche, une en face, deux à droite. Il n’y a pas de panneau signalisations, et il n’y en aura pas pendant les milliers de kilomètres que nous ferons. Il y a sur notre carte uniquement une route d’indiquée, nous sommes un peu perdu et notre gps aussi. Nous demandons notre chemin à un autochtone qui nous montre non pas la piste à prendre, mais plutôt la direction. On suit le conseil et l’on se rend compte que ces 3/4 pistes vont toutes au même endroit. Cela sera une constante en Mongolie. Une piste a au départ été façonnée dans la steppe, mais un véhicule voyant que la piste était en mauvaises état, faites de trous et de sables, prend un autre chemin, et ainsi de suite. Nous sommes ainsi tombés parfois avec une cinquantaine de pistes (sans exagérer) face à nous. Laquelle choisir, laquelle est la meilleure, ou plutôt laquelle est la moins pire. Le chemin le plus court n’étant pas tout le temps le moins long.

Le piège aussi est que parfois une piste semble aller dans la même direction que les autres et en fait s’écarte tout doucement pour aller vers un autre petit village dans une autre direction. Si seulement nous avions des points de repères, mais dans des steppes si vastes, se perdre est facilement aisé. Marie vérifie régulièrement le gps afin de ne pas être trop loin du trajet principal, mais en 15min, on peut vite se retrouver à plusieurs kilomètres. Bref ce n’est pas une mince affaire de se repérer ici. Nous apprendrons à arrêter aussi régulièrement les rares voitures qui viennent face à nous pour vérifier la direction. Quand il n’y a pas de voiture et quand le gps est perdu et que la route la plus proche est à plusieurs dizaines de kilomètres nous improvisons sur les pistes. Dans le Sud de la Mongolie en arrivant vers le désert de Gobi, nous avons  dut parcourir plus de 100km avant d’apercevoir un camion qui arpentait la piste principale (en fait tout aussi pourri que nos pistes secondaires).


La piste parfois se transforme aussi en « tôle ondulée ». Je ne sais pas si c’est le terme exacte, mais faire 30km sur des vibrations constantes ça use énormément, les bras, le dos et aussi le moral. Parfois les fins de journées étaient longues et interminables avant de trouver un endroit agréable pour dormir, ou encore un point d’eau (chose rare ici). Et quand le sable revient dans la partie… on en peut vraiment plus à la fin de la journée mais toujours avec les yeux remplis d'image de ces paysages.


Les vents, constant en Mongolie, ont aussi un rôle prépondérant dans la conduite. Parfois de dos, ils poussent aisément notre monture, parfois de face, nous sommes obligés de rétrograder pour redonner de la vitesse à l’engin, et enfin parfois de côté, nous sommes penchés en continu ( ce qui donne un certains strabisme à notre conduite). Ah il y aussi les tornades, petites certes, mais souvent invisibles sur la route, cela donne une conduite stable puis gros coup de vent à droite puis une seconde plus tard gros coup de vent à gauche (où vice versa). Quand elles sont visibles au loin, soulevant de gros nuages de poussières, nous les laisserons tranquillement traversés la route, tel un piéton s’engageant sur un passage clouté, avant de continuer notre chemin.


La dernière piste que nous prendrons sera un résumé de tout cela. 60km de piste jalonnée de « tôle ondulée », de sables, de gravier, petits, gros ronds ou coupants, des rochers parfois (?!), de l’herbe, de la terre et cela parfois dans un nuage de poussière soulevé par les vents qui balayent les steppes. Cette dernière nous prendra 3 heures.


On a chuté une seule fois dans le sable à faible vitesse, je m’en suis tiré avec un gros bleu et Marie rien, heureusement.


Bref, après calcul on a fait plus de 4700 km ici en Mongolie et on se souviendra longtemps de ses routes ardues et aléatoires mais offrant des paysages plus époustouflant les uns que les autres. Comme nous disait la loueuse « une aventure ».